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La dapagliflozine élargit ses indications

 
Interview du Pr Olivier Hanon, cardiogériatre et président du gérontopôle d’Île-de-France

Propos recueillis par Alexandre Morales, journaliste santé

 

La dapagliflozine, un inhibiteur des SGLT2, initialement utilisée dans la prise en charge du diabète, a successivement étendu ses indications dans l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection (FE) réduite, dans la maladie rénale chronique et désormais dans l’IC à FE préservée. Il est désormais possible de prescrire la dapagliflozine quelle que soit la FE.    

 

Pourquoi a-t-il été décidé d’étendre les indications de la dapagliflozine sur tout l’éventail de fraction d’éjection ventriculaire ?

Cette nouvelle indication fait suite à une étude qui s’est intéressée à la fraction d’éjection (FE) de plus de 40 %. Elle montre une réduction de près de 20 % de la survenue d’événements, avec pour critères principaux les hospitalisations pour insuffisance cardiaque ou la mortalité cardiovasculaire.

C’est d’ailleurs extrêmement pertinent en gériatrie puisque la FE préservée est la forme d’insuffisance cardiaque la plus fréquente chez les personnes âgées. Par ailleurs, l’insuffisance cardiaque est maintenant la première cause d’hospitalisation dans les unités de gériatrie aiguë.

 

La molécule est-elle efficace ?

Pour estimer l’efficacité et au-delà de la réduction des hospitalisations pour insuffisance cardiaque, on se fonde sur un critère secondaire qui est majeur : la qualité de vie. L’important pour les personnes âgées n’est pas forcément de vivre jusqu’à 120 ans, mais de vivre avec une bonne qualité de vie. C’est-à-dire ne pas être essoufflé, ne pas rester dans son fauteuil ou dans son lit sans bouger, etc. 

Toutes les études montrent justement qu’il y a un bénéfice, avec la dapagliflozine et les inhibiteurs des SGLT2, sur l’amélioration de la qualité de vie. Le bénéfice est observé dès la première semaine. D’où l’intérêt de la prescrire au moment de l’hospitalisation, de ne pas attendre que les gens sortent ou soient revus après 3 mois, pour initier un traitement. Sinon il y a une perte de chance.

 

Quels sont les effets secondaires à la prise de dapagliflozine ? 

Avec cette classe médicamenteuse, la tolérance est excellente puisque l’on n’observe quasiment pas d’hypo­glycémie ou de baisse de pression artérielle et il y a même une amélioration de la fonction rénale. Les seuls effets secondaires que l’on rencontre, en particulier chez les patients diabétiques, sont des infections génitales, plutôt d’origine mycosique. Elles ne sont pas graves, mais il est important de les traiter. Elles deviennent tout de même deux fois plus fréquentes que dans le reste de la population. Mais cet effet secondaire est faible par rapport au bénéfice de 20 % sur la mortalité/hospitalisation pour insuffisance cardiaque. 

 

Des interactions médicamenteuses ?

Il peut y avoir des interactions médicamenteuses chez des patients diabétiques. En particulier s’ils reçoivent déjà un traitement pour cette pathologie. Rajouter un antidiabétique pourrait majorer la baisse de glycémie. Il faudra donc réduire de 20 à 30 % la dose d’insuline (ou de sulfamides hypoglycémiants qui sont à éviter chez le sujet âgé). Il faut également faire attention à la majoration de l’effet diurétique (lors du traitement de la phase congestive d’une décompensation pour insuffisance cardiaque).

Chez les patients diabétiques, en cas d’événement de stress aigu comme une infection, une hospitalisation, ou une chirurgie, il peut y avoir un risque d’acidocétose. Dans ces conditions, les recommandations sont donc d’arrêter le traitement pendant 3 jours.

 

Quelles sont les indications du traitement ? 

La dapagliflozine va généralement être introduite en première intention, puisqu’elle a peu d’effets secondaires. C’est aussi la raison pour laquelle elle peut être prescrite par des gériatres sans avoir besoin d’attendre le cardiologue.

Le gros avantage est qu’il n’y a qu’une seule dose : 10 mg. Alors que pour tous les autres médicaments cardiovasculaires, il faut faire une titration, ici elle n’est pas nécessaire. C’est l’idéal pour les patients âgés.

Par ailleurs, il n’y a pas vraiment de contre-indication. Quand la fonction rénale est inférieure à 25 ml par minute (selon la formule de CKD-EPI), le traitement est simplement moins efficace. C’est pourquoi on recommande de ne pas la prescrire pour des clairances en dessous de 25.

C’est un traitement très intéressant, car ce sont les patients les plus âgés et les plus fragiles qui en bénéficient le plus. Pour une pathologie pour laquelle on n’avait jusqu’à présent pas de traitement, c’est tout à fait séduisant.