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La libération des émotions : retour sur le colloque de psychogériatrie de l’Afar

Le jeudi 15 mars dernier se tenait à la maison de la Chimie (Paris) le colloque Afar « La psychogériatrie, une approche qui rassemble autour de la personne âgée », sous la direction du Dr Jean-Claude Monfort, psychogériatre au Centre hospitalier Sainte-Anne (Paris) et du Dr Anne- Marie Lezy, gériatre à l’hôpital Corentin Celton. Nous vous résumons dans ce numéro de Repères en gériatrie l’une des tables rondes de l’après-midi, consacrée à la « libération des émotions ».

« Les personnes âgées ont tendance à s’isoler du monde »

Déborah Dressaire-Guibaud, psychologue à Nîmes, a été la première à prendre la parole pour nous livrer les résultats d’une recherche effectuée dans le cadre de son master il y a une dizaine d’années, sur l’évolution des émotions des personnes âgées à partir de leur entrée en institution. « Cette entrée en institution représente à mon sens une des mises à l’épreuve ultimes des capacités de faire face des individus », estime-t- elle. En institution, les émotions de la personne âgée sont mises à mal, et il n’est pas rare de voir les résidents se couper de leur environnement et se replier dans leur “vie intérieure”. Certains y voient là une illustration de la théorie du désengagement énoncée par Cumming et Henry en 1961, d’autres émettent l’hypothèse que le vieillissement s’accompagnerait d’une meilleure autorégulation des émotions. Déborah Dressaire-Guibaud s’est spécifiquement intéressée à l’alexithymie*, qui est l’incapacité à exprimer ses émotions par des mots. Selon McDougall (1991), elle pourrait dans certains cas agir comme un mécanisme de défense, qui permettrait au sujet la mettant en place de se couper de sa conflictualité psychique. Dans la vieillesse, l’alexithymie seraitelle une façon de faire face ? Pour tenter de répondre à cette question, Déborah Dressaire-Guibaud a mis en place une étude incluant 62 participants, dont 15 contrôles (actifs entre 45 et 60 ans). Parmi les 47 sujet âgés, 15 vivaient encore à domicile, 18 étaient en institution depuis moins d’1 an et demi et 14 depuis plus de 4 ans. Tous les participants ont répondu à l’échelle de faire face (Coping Inventory for Stressfull Situations, CISS) et l’échelle d’alexithymie (Toronto Alexithymia Scale, TAS- 20). L’échelle de faire face permettait d’analyser les différents types de faire face (ou coping en anglais) selon qu’il soit centré sur le problème, l’évitement ou l’émotion. Les résultats ont montré que plus longue était la durée des personnes en institution, moins celles-ci utilisaient le coping centré sur le problème. Pour illustrer ces propos, Déborah Dressaire-Guibaud cite une résidante : « Dans ma vie, il ne s’agit plus d’affronter le problème, ce n’est plus la peine, je ne peux que subir cette situation, car je sais que quoi qu’il arrive, quelqu’un sera là pour prendre une décision à ma place. » Concernant l’échelle d’alexithymie, des différences significatives étaient retrouvées selon l’avancée en âge, mais également la durée de vie en institution.
En résumé, cette étude montre que plus la durée de vie en institution est importante, plus les personnes âgées ont tendance à s’isoler du monde. Ainsi, l’alexithymie pourrait se déclarer en réponse à une incompréhension du vécu émotionnel suite à une suractivation des éléments propres à la vie interne de la personne.
« Est-ce que ces comportements de repli sur soi ne seraient pas dus à une sorte d’iatrogénie de l’institution ? N’est-on pas trop “maternant” ? » s’interroge le Dr Jean Roche, psychogériatre au CHRU de Lille et modérateur de la table ronde. Une question légitime, d’après Déborah Dressaire-Guibaud. Elle se souvient des mots d’une résidante : « Ici, on me demande comment je vais, mais on ne m’écoute pas ». Au fur et à mesure, ces patients “écoutés, mais non entendus” finissent par répondre machinalement aux questions des soignants… et apporter des réponses stéréotypées. « Nous avons tendance à ôter toute capacité à la personne, d’autant plus lorsqu’on est en présence d’une pathologie neurodégénérative, alors qu’on sait tous qu’il y a des capacités préservées », conclut la psychologue.

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